- Arbre généalogique:
Avant de vous parler d’Aileen, il me faut vous parler de la famille Rosier. Pas son ensemble, évidemment, mais des branches qui nous intéressent particulièrement ici. Rosier… Ce nom en fait trembler plus d’un. Cette famille possède un sang plus pur que pur, choisissant depuis ses origines avec le plus grand soin ses alliances, ne les créant qu’avec les autres familles des Vingt-Huit. Quelques exceptions furent faites au profit de famille de Sang Pur des États-Unis mais elles demeurent faibles. La famille Rosier était alors composée d’une sœur et trois frères : Druella, qui épousa Cygnus Black, Augustus, Magnus puis Elbert. Augustus et Elbert, choisirent, à leur majorité, de retourner vivre en Écosse, en partie à cause des origines de leurs épouses respectives quand Magnus prit la route du Pays de Galles. Le plus âgé et le plus jeune des frères demeurèrent très proches.
Augustus épousa Kenna Forbes, une sorcière de Sang-Pur originaire des États-Unis et possédant un nom qui avait une certaine renommée outre Atlantique. Mais Kenna possédait de solides racines écossaises ce qui la fit rentrer en Grande-Bretagne. Mariage plus arrangé qu’autre chose, ils ne tardèrent pas à se tourner vers les Ténèbres et la Magie Noire, chose qui les attirait grandement. Augustus était un homme froid, implacable, véritable chef de famille et Kenna était façonnée à son image. Un couple parfait, en somme. Lui travaillait à Gringotts, elle à Ste Mangouste où elle était désempoisonneuse. D’un autre côté, Elbert épousa Irelia Dolohov, amie d’école de son frère avant de devenir sa femme. Il commença à travailler au ministère, au Département de la coopération magique internationale, dans la section commerciale. Les deux couples ne tardèrent pas à se tourner vers le Lord montant doucement, eux qui avaient été à Poudlard en même temps que lui. Prônant leur ascendance Pure, répugnant tout autre sang qui osait se dire sorcier, ils devinrent tous ses partisans dès qu’ils le purent. Et alors, les deux familles se fondèrent non sans être éloignées.
Augustus et Kenna eurent un premier fils. Héritier parfait de cette famille, avenir des Rosier, cette naissance fut une bénédiction et les parents de ce jeune enfant furent plus que ravis devant cette réussite. Deux ans plus tard, ce furent Elbert et Irelia qui mirent au monde leur fille, Rhona. Les deux enfants furent élevés comme frère et sœur de part les liens proches de la famille qui se réunissait tant pour se revoir que pour préparer de mauvais coups. Puis, vint l’année 1961 et la naissance de la frêle Aileen. L’implacable Augustus sourit à la naissance de sa fille quand Kenna ne cessait plus de lui reprocher cet aspect fragile qu’elle avait. Tout aurait pu suivre son cours et les Mangemorts qu’étaient les Rosier auraient pu tout simplement étendre leur pouvoir. Mais la vie est parfois injuste.
8 juin 1963
Sad Day.
Ses deux petites jambes la soutenaient par on ne savait quel enchantement. La petite fille trottinait gaiement dans le grand manoir des Rosier, arborant un sourire de chipie qui prépare une mauvaise plaisanterie. Son aîné et sa cousine étaient sortis jouer dehors et elle ne pouvait encore avoir ce grand privilège, elle qui n’avait que deux ans. Alors elle parcourait les couloirs de ce grand manoir, passant d’une pièce à l’autre en admirant pour la énième fois les murs hauts et forts de la bâtisse, décorés avec soin et reflétant la grande richesse et la classe de la famille Rosier. Les moulures ornaient le plafond et de larges cheminées de marbre prenaient place dans un grand nombre de pièces de la demeure. Aileen y était née. De son regard d’enfant, chaque jour, elle accordait de l’importance à quelques menus détails qui n’en avaient plus aux yeux des adultes. Elle s’avança doucement dans le grand hall du petit château, large pièce qui était le cœur de vie de la maison. Le plafond rejoignait le toit et elle était parcourut par un large escalier qui menait aux trois étages supérieurs. La brunette laissa ses yeux noisette redécouvrir, une fois de plus cette grande salle où s’était déjà joué plusieurs réunions et cérémonies. Elle ne pouvait comprendre le sens de tout ceci, son âge la retenant dans une candeur pure et brillante d’une pâleur chaste. Mais laisser ses yeux vagabonder sur tous ces gens sans qu’ils ne puissent forcément vous voir était une chose amusante pour une enfant de deux ans.
La large porte de chêne s’ouvrit à la volée et l’enfant lâcha un petit cri de surprise, sursautant et fixant du regard celui qui venait de faire une entrée des plus marquée. Oncle Elbert. Les yeux d’Aileen s’écarquillèrent doucement devant la stature imposante – depuis son point de vue – de son oncle tandis qu’il avançait dans le hall, la mine soucieuse. A plusieurs reprises, il appela la maîtresse de maison afin de la voir venir à lui, ce qui ne tarda guère. Kenna. La sorcière était droite, belle et farouchement mauvaise dans le regard. L’arrivée impromptue d’Elbert, cependant, la figea, telle une statue. Elle porta une main devant sa bouche, comme comprenant la raison de la présence de ce beau-frère avant même qu’il n’ait le temps de l’expliquer. Le regard glacial et implacable de la sorcière tomba sur sa fille. L’enfant craignait ce parent plus que de raison. Un pressentiment, un frisson dans le dos, une voix à l’oreille lui murmurant de la craindre. Kenna ne l’aimait pas. C’était ainsi que l’enfant voyait les choses. Une mère qui chérissait son fils mais qui délaissait cette chétive créature que pouvait être sa fille. Alors la mère emmena dans le salon l’oncle de la petite fille qui suivit ce mouvement du regard… Avant de les suivre par le mouvement.
Se cachant derrière la porte, elle ne tarda pas à entendre sa mère pleurer, son oncle tâchant de la réconforter d’une voix qui n’était qu’à moitié la sienne, couverte par son propre chagrin. Alors la jeune enfant avait penché la tête pour observer la scène. Kenna était dans les bras d’Elbert. La suite, elle ne la comprit pas réellement. Un sentiment puissant l’envahit. Une tristesse infinie, l’impression que l’on venait de lui arracher une part d’elle-même. L’image de son père et de sa tante se glissa dans son esprit et la petite se mit doucement à pleurer, sans comprendre. Les émotions étaient trop fortes et surtout, n’était pas celle d’Aileen. Voilà qu’elle venait à percevoir la tristesse de sa mère doublée de celle de son oncle et, pire, à la comprendre. Elle avait ce sentiment terrible qu’elle ne reverrait jamais son précieux père, ni même sa tante. Tremblante, la petite tentait de retenir ses sanglots quand une nouvelle émotion la traversa. La colère. Celle de se trouver si impuissante. Là encore, les sentiments de Kenna s’immiscaient en elle et alors, la jeune enfant eu ce sentiment terrible que sa tête allait exploser.
Un vacarme assourdissant se fit entendre tandis que sa tête demeurait pourtant entière. On ne pouvait dire la même chose d’un vase qui appartenait à sa mère et qui avait volé en éclats, provoquant une grande stupéfaction qu’elle partageait avec ses proches. Aileen recula d’un pas, se cachant derrière la porte tandis qu’elle entendait la voix de sa mère s’interroger. Des pas se succédèrent et Aileen commença à tourner les talons, ne s’arrêtant que lorsque les pas se turent. Alors elle se retourna et fit face à son oncle qui l’observait avec une grande attention. La petite fille, les joues humides de larmes déversées, pinça délicatement les lèvres dans une moue aussi boudeuse qu’innocente et Elbert finit par revenir auprès de Kenna, sans mot dire. La brunette regagna alors la cuisine où elle demeura, sagement, assise sur un tabouret. Elle n’en bougea pas de l’après-midi, ne se remettant en mouvement que lorsque que Roy et Rhona entrèrent, suivis de près par Kenna et Elbert qui ne tardèrent à leur annoncer la nouvelle. Rien ne serait jamais plus pareil.
juillet 1966
World's Cup
« Tu vois bien ? » Aileen hocha la tête et servit le plus beau sourire à son aîné. L’ambiance était électrique et elle avait l’impression que l’air ne cessait plus de vibrer autour d’elle, la forçant à entrer dans une transe qu’elle ne comprenait pas. Située dans l’une des plus belles loges qu’offrait le grand stade, elle s’apprêtait à regarder le match de l’année : la finale de la coupe du monde de Quidditch qui avait lieu en Australie. C’était Roy qui avait tenu à y aller, relevant le fait que beaucoup de ses camarades étaient friands de ce sports et seraient présents. Des camarades aux noms bien connus des Rosier qui avaient considéré la chose avant d’accepter de se rendre à l’autre bout du monde pour cet évènement exceptionnel. Elbert avait fait le déplacement avec Roy qui avait souhaité que sa petite sœur puisse également venir. Ainsi, ils se trouvaient maintenant tous les trois dans une loge qui pouvait contenir facilement six personnes. Aileen agitait un petit drapeau australien et Roy encourageait les joueurs qui s’élançaient sur le terrain, chevauchant leurs balais. Quel sport incroyable que le Quidditch.
La joie était profonde pour Aileen qui ressentait cet élan, cette fièvre incroyable offerte par les supporter qui scandaient leurs encouragements à une équipe ou l’autre. Elle aurait pu en avoir le tournis mais avait fini par se concentrer sur le match, les actions, demandant à son frère aîné les règles quand elle ne les comprenait pas. Bientôt, elle ne tarda pas à s’agiter en tous sens, gagnée par ce virus qu’était le Quidditch. Comble du bonheur, l’Australie remporta le match. Mais la fête ne s’arrêta pas dans le cœur de la jeune fillette qui, le soir venu, quand ils eurent regagné leur tente, ne cessait plus de questionner son frère sur le Quidditch. Il lui répondit qu’il y avait également des équipes spécifiques et lui en donna quelques noms avant de préciser que la pratique du Quidditch était également possible à Poudlard.
« Alors je pourrais en faire quand je serais à l’école ? » Roy sourit doucement et ébouriffa les cheveux de sa petite sœur.
« Encore faut-il que tu tiennes sur un balai. Pis bon, t’es une fille. Tout le monde sait que les filles sont moins bonnes… Tu voudrais faire quoi ? Gardien ? » « Non, moi je veux lancer le souaffle et marquer des points ! » « Poursuiveur ? Laisse tomber, Aileen… T’y arriveras jamais. » Comme un défi qu’il lui avait lancé en ce jour, la petit brune n’eut de cesse de se convaincre du contraire, encore et encore.
juillet 1967
Inside you're head
Plic. Ploc. La pluie tombait abondamment sur la pierre du manoir, donnant cette atmosphère si particulière, presque surnaturelle à ce lieu déjà empli de magie.
« Alors, Aileen… Ca fait quoi de se dire que tu vas te retrouver toute seule, à la maison, comme le petit vermisseau que tu as toujours été ? » La petite brune, les mèches de cheveux collées à son visage à cause de l’eau qu’ils avaient captée, observa sa cousine sans répondre tandis que la jeune fille éclatait d’un rire purement sadique. Rhona avait toujours été mauvaise avec sa jeune cousine. Pourquoi ? Longtemps, Aileen n’avait pas compris les raisons de cela. Et puis, elle avait réussi à ressentir cette rage, cette envie, cette jalousie… Et à la comprendre.
« Je serais juste un peu plus avec ton père, quand toi tu seras loin. » Et Aileen avait décidé d’appuyer là-dessus afin d’essayer de faire plier sa cousine. L’orage gronda au dessus d’elle. La dernière née de la famille Rosier défiait son aîné sans essayer de prendre en compte les conséquences. Rhona, elle, sembla s’étrangler avec son ressentiment.
« Qu’est-ce que t’as dit ? » Elle fit un pas en avant, comme pour s’apprêter à frapper sa cousine qui écarquilla les yeux. Mais elle ne se démontrait pas. Non.
Aileen prit une profonde inspiration et releva le menton.
« Je te plains, Rhona. Tu es toute seule. C’est ça, que tu ressens. Tu aimerais être à ma place, tu es jalouse de moi. Roy m’aime parce qu’il est mon frère et qu’il semble normal de me protéger. Ma mère me hait parce que je ne fais que lui rappeler père. Quant à oncle Elbert, il attend beaucoup de moi. Il aimerait que je sois sa fille, et pas toi… » Elle avait prononcé tout cela sur un ton d’une innocence désarmante. La petite n’avait que six ans mais semblait comprendre mieux que quiconque les émotions qui pouvaient traverser les esprits des membres de sa famille. Rhona tremblait d’une rage sans nom. Et avant qu’elle n’ait eu le temps de se jeter sur Aileen, cette dernière comprit ce qui allait se passer et tourna les talons pour courir. La pluie battante lui frappait le visage. Dans sa précipitation, elle ne vit pas Rhona qui avait glissé et qui gisait dans la boue derrière elle. Alors elle continua de courir. Le ciel se zébrait d’éclair et la brunette ne cessa de courir que lorsqu’elle eut atteint un large terrier dissimulé dans le bois non loin de leur demeure. Elle attendit là durant de longues heures, se protégeant de la pluie du mieux qu’elle le pouvait et reprenant son souffle.
Le lendemain, ce fut Roy qui la trouva. Rhona lui avait raconté ce qu’il s’était passé et l’aîné avait souhaité retrouver sa cadette. Il l’avait ramenée chez eux, lui préparant même un bain bien chaud pour la réchauffer. Jamais les adultes n’eurent vent de cette histoire.
mars 1970
Father's soul
Ses doigts glissaient sur les touches ivoire de l’instrument, offrant une résonnance grandiose dans la large pièce et venant caresser les murs de sentiments profonds. A ses côtés, son oncle Elbert jouait également, faisant d’une simple pièce de Brahms un quatre mains d’exception. Il n’y avait plus qu’eux. L’ambition d’Aileen demeurait celle de dépasser son maître qu’était son oncle et elle ne cessait plus de faire virevolter ses doigts fins et longilignes sur le clavier remontant de temps à autres dans les aigus pour redonner un peu de panache à ce morceau qui s’acheva sur une cadence parfaite soutenue par le duo avant un relâchement qui se fit à l’unisson. La petite brunette adopta alors un sourire satisfait, tournant son minois vers son oncle. Ce dernier laissa un mince sourire énigmatique se dessiner sur ses lèvres.
« Bien. Tu as encore progressé. » Le sourire d’Aileen s’élargit un peu plus avant qu’elle n’ose sortir une phrase.
« Suis-je désormais aussi douée que Rhona ? » Elbert sourit avec un peu plus de douceur, posant sa main sur celle de sa nièce.
« Il y a bien longtemps que tu as surpassé ta cousine dans ce domaine, Aileen. Et bientôt, tu pourras te mesurer à elle dans d’autres et affirmer cette position de supériorité qui te sied grandement. » Un sourire satisfait se dessina sur les lèvres de l’enfant.
L’homme se leva alors du siège et Aileen prit place de manière plus centrée devant le clavier, reposant ses doigts sur ce dernier et entamant une autre pièce emplie d’une mélancolie certaine. Elle pensait que son oncle s’était absenté, retiré, qu’il avait quitté cette pièce et qu’elle demeurait seule avec l’instrument, le faisant parler avec quelques notes de musique. Ce morceau n’était pas n’importe lequel. C’était celui que, longtemps, elle avait entendu dans son enfance, la hantant encore et encore. Un morceau joué par son père et voilà qu’elle y déversait son âme, tout comme lui l’avait fait auparavant. Elle ne l’ignorait pas et venait doucement chatouiller ce talent qu’elle avait gardé de lui, à l’image de sa soif de réussite et de succès. Les minutes passèrent, toutes semblant pourtant plus courtes qu’elle ne l’étaient car l’instant était puissant. Et enfin, elle déposa la dernière note, conclusion d’un instant délicat.
« Tu es bien la fille de ton père… » Aileen sursauta et se retourna vivement, les yeux écarquillés croisant le regard ému de son oncle. Elle eut un petit sourire pour lui avant qu’il ne reprenne.
« Puisses-tu avoir, comme lui, la vocation de devenir puissante et reconnue, chère Aileen. » La jeune enfant se leva et s’avança alors vers lui, droite comme un i et gracieuse comme on le lui avait enseigné.
« Jamais je n’entacherai sa mémoire et je ferais tout mon possible pour lui rendre honneur. Je vous le promets. » Elle se glissa alors dans ses bras pour une étreinte familiale qui était bien rare mais si rassurante et réconfortante.
août 1972
You're a witch
« Tu as ta liste ? » La jeune fille hocha la tête, les yeux marqués par cette joie qui la dévorait. Enfin. Enfin, elle se rendait sur le chemin de Traverse avec son frère et son oncle dans le but d’acheter ses propres fournitures scolaires. Cette fois-ci, elle n’accompagnait pas seulement mais serait le centre de toutes les attentions. Peut-être était-ce pour cela que Rhona n’avait pas souhaité venir, jalouse comme elle pouvait l’être de cette petite fille. Elle avait préféré confier la liste de ses nouveaux manuels et affaires nécessaires à son père bien aimé. En soit, il y avait peu de choses nécessaires à l’achat pour elle qui n’avait qu’un an de moins que Roy et pouvait donc récupérer tous les manuels de ce dernier qui se montrait d’autant plus soigneux avec ses affaires qu’il savait sa cousine fortement mécontente à l’idée de devoir reprendre des livres miteux qui seraient bien peu à l’image de son rang. Rhona aspirait à devenir reine de Serpentard dès lors que leur cousine Narcissa partirait, à reprendre ce flambeau. Une longue histoire commune aux écoles, en somme.
Les boutiques se succédèrent et Aileen obtint toujours le meilleur matériel. Ses robes de sorcier étaient taillées sur mesure, son chaudron était en argent et son parchemin était d’une qualité garantie supérieure. La famille Rosier arpentait le chemin de traverse sous quelques regards envieux et murmures de passants. Elbert, travaillant au ministère, était parfois arrêté par quelques sorciers et sorcières désirant se faire une place dans ce vaste monde et c’était avec un dégagement profond que l’oncle finissait par les congédier. Supérieur. Ils étaient supérieur, ainsi pensait-il et sentait-il les choses. Des émotions qu’Aileen ne comprenait qu’à moitié sans pour autant en parler, se contentant de penser et d’avoir envie de se créer son propre avis sur le sujet.
Finalement, Roy s’absenta et ce fut seule avec son oncle qu’Aileen entra dans la célèbre boutique de Olivander. La requête ne fut pas longue et déjà, l’homme de petite taille commença à chercher dans les méandres de ses étagères une baguette qui serait digne de la jeune sorcière que deviendrait la petite brunette. Elle qui avait espéré que cela ne dure guère longtemps, sa patience fut vilainement attaquée quand, au bout de plusieurs dizaines d’essais, aucune baguette ne semblait trouver grâce aux yeux de l’enfant qui avait fini par adresser des regards inquiets à son oncle, assis dans un fauteuil derrière elle. Il lui adressa, pourtant, un sourire encourageant, et au fond d’elle, elle ressentit un regain de confiance, d’assurance et de réussite proche. Un petit sourire en coin se dessina sur le bord de ses lèvres et les essais reprirent. Finalement, on lui présenta une baguette d’un noir profond et à la flexibilité moyenne. En bois d’ébène, d’une longueur raisonnable… Aileen s’en saisit et il ne fallut guère longtemps aux deux hommes pour se rendre compte qu’il s’agissait là de la bonne prise. Elbert s’était redressé dans son fauteuil et jeta un regard à cette baguette à la découpe gracieuse. Olivander la replaça dans sa boite et la donna à sa propriétaire qui le remercia dans un souffle.
Elbert et sa nièce retrouvèrent alors Roy qui avait une nouvelle surprise pour sa jeune sœur. Une chouette hulotte au plumage clair. Ainsi, elle posséderait son propre animal et serait en mesure de correspondre avec sa famille qu’importe où ils pourraient se trouver. Poudlard s’annonçait alors comme un sanctuaire dans le cœur de la jeune file qui n’avait plus aucune peur de s’y rendre.
1er septembre 1972
Welcome to Hogwarts
Poudlard. Tout ce qu’Aileen en connaissait, c’était les diverses descriptions réalisées par ses aînés. Alors monter dans le train à vapeur aux côtés de Roy – qui était en Septième année – et se savoir protégée par de nombreuses personnes qui apprécient votre air simplement lorsqu’ils apprennent votre nom de famille était une chose qui ne pouvait pas déplaire à la brunette. A peine le train lancé qu’elle avait déjà envie d’apprendre et de lancer des sorts comme le faisait tous les sorciers, souhaitant s’imposer comme l’une des meilleures. Curieuse elle était de découvrir ce nouvel univers où elle allait évoluer, mais déjà l’envie de se surpasser et de surpasser les autres se faisait sentir. Après tout, ne lui répétait-on pas qu’elle serait une grande sorcière vouée à réaliser de grandes choses ? Une seule ombre venaient parfois, durant le trajet, obscurcir le tableau. Roy ne manqua pas, devant ses camarades, de rappeler que tous les Rosier avaient prit place dans la plus noble maison de Poudlard : Serpentard. D’un regard tourné vers sa jeune sœur, il sourit légèrement en coin.
« Croyez moi, ce n’est pas Aileen qui dérogera à cette règle. Elle possède toutes les qualités nécessaires pour venir faire briller notre blason, pas vrai petite sœur ? » Un sourire énigmatique autant qu’empli d’une détermination farouche se dessina sur les lèvres de la jeune Aileen, dissimulant ses doutes. Mais elle ne pouvait s’en détacher entièrement. Que diraient son oncle et sa mère si elle n’était pas reçue à Serpentard ? Pour sûr, elle deviendrait la risée de toute sa famille. Pire, ils pourraient envisager de la rejeter, eux qui ne jurent que par les ténèbres, la Magie Noire et leur Sang Pur. Aller dans une maison autre que Serpentard serait une aberration pour eux, elle le savait très bien. Cela était inenvisageable.
En descendant du train, Roy la serra une dernière fois contre lui, lui assurant que tout se passerait bien et qu’il savait qu’elle suivrait la voie qui est sienne, comme le reste de leur famille l’avait fait avant eux. Rhona lui adressa un sourire mauvais. Oh, comme elle devait jubiler, elle, à l’idée de pouvoir repousser cette intruse étrange, cette cousine qui n’était qu’un obstacle dans sa relation avec Roy. Elle aperçut également son autre cousin, Evan qui avait un an de plus qu’elle. Tous les Rosier arboraient fièrement les couleurs du serpent argenté sur fond d’émeraude, accroché à leur poitrine. Comment pourrait-il en être autrement pour elle ?
Elle suivit les élèves qui, comme elle, rentreraient en première année et laissa ses yeux découvrir ce spectacle grandiose et merveilleux. Le lac noir de Poudlard reflétait merveilleusement l’éclat de la lune, tel un miroir ondulant gracieusement sous les barques. Puis, débarquant de l’autre côté de la rive, ils avancèrent dans le château et parcoururent ensemble les couloirs avant de pénétrer dans la grande salle. Les yeux de la jeune fille avaient contemplé le plafond magique ainsi que les bougies flottant dans les airs. Ce pouvait-il qu’il existe plus bel endroit que celui-là ? Non. Elle en était persuadée en cet instant et ne s’imaginait même plus rentrer chez elle. De nouveau, elle croisa le regard rassurant de Roy et lui adressa un faible sourire. Les premières années avaient pris place au devant des autres élèves et attendaient devant un tabouret sur lequel était posé le fameux Choixpeau magique. La gorge d’Aileen s’était serrée et elle avait longuement dû attendre l’appel de son nom. Et quand celui-ci finit par résonner dans la grande pièce, elle prit une profonde inspiration avant de s’avancer vers le tabouret où elle prit place, recevant le Choixpeau sur la tête. Le temps lui parut long et alors, elle se mit à penser à la colère de ses proches si elle n’allait pas à Serpentard. Elle ne sut si le couvre-chef l’avait écouté, ce jour là, mais il exécuta son souhait le plus cher et ce fut avec un sourire enthousiaste qu’elle rejoignit son frère.
mars 1973
Slytherin's legacy
Droite. Fière. Débordant d’assurance. La jeune Aileen suivait le mouvement, entrant dans la grande salle en suivant la Reine, sa bien aimée cousine Narcissa. Rares étaient les premières années qui pouvaient se dire appartenant à la Cour d’une reine de l’école et pourtant, Aileen avait réussi à se creuser son petit trou de souris. Certes, quelques passe-droits l’avaient aidé et notamment son lien de sang avec la dite Reine. Mais la jeune fille aimait cette place qui lui garantissait une certaine sécurité au sein de sa maison et lui permettait également de, doucement, lui faire sa place au sein de l’école. La brunette appréciait grandement la classe dégagée par sa cousine et aurait tant donné pour lui ressembler. Jamais elles n’avaient été aussi proches, l’une de l’autre, que durant cette année scolaire. Roy semblait satisfait de constater que sa jeune sœur avait su se faire une place parmi ceux qui se prétendaient meilleurs que les autres. La fierté de toute la famille Rosier était là, dans le cœur de la petite princesse qui suivait Narcissa comme un véritable petit chien. Et pourtant, elle n’était jamais traitée comme tel.
Il n’avait pas fallut longtemps à la jeune élève pour se démarquer dans les cours mais également dans sa maison. Elle parvenait toujours à ramener des points pour Serpentard et ça, c’était plus que bénéfique et plutôt bien vu dans la mesure où tous les Serpents aspiraient à voir la coupe des quatre Maisons dans leur salle commune l’année suivante. Aileen était un élément positif et le ressentait. De plus, elle possédait un véritable atout : cette capacité à ressentir les sentiments des autres et à les comprendre. Plus d’une fois elle avait osé prendre la parole et offrir conseils et avertissements. Parfois, on lui riait au nez, d’autre fois, on lui prêtait attention. Aileen était capable de savoir quels étaient les sentiments de ses camarades, y compris à son égard et parvenait donc à déjouer les pièges qu’on lui tendait, emplis de mauvaises intentions. Devenir l’héritière de sa cousine Narcissa ? Pour sûr, Aileen en aurait été flattée mais d’autres, plus âgée souhaitaient déjà récupérer cette Cour et en prendre le contrôle.
La Reine prit place à la table et Aileen était prête à prendre une place loin d’elle, laissant ses aînés s’installer dans son entourage proche. Mais la voix de Narcissa s’éleva, demandant sa présence en face d’elle. La brunette avait souri et s’était exécutée. Nul doute que son oncle serait fier d’elle en cet instant.
octobre 1974
Part of a Team.
« Et pourquoi on aurait besoin d’une fille dans notre équipe, au juste ? » Le capitaine de l’équipe de Quidditch l’observait d’un air franchement macho. Lui portait la robe verte et argent des Serpentards. Elle, de simples vêtements qui ne craignaient rien. Ils étaient quelques uns à s’être présentés pour espérer intégrer les bancs des Serpents et seules quelques filles avaient tenté leur chance. Mais beaucoup avaient déjà fait marche arrière et Aileen se retrouvait déjà presque seule. Elle ressentait le doute des autres, leur angoisse de s’effondrer pendant l’essai. La peur s’était glissée en elle, résultante des émois ressentis par ses pairs qu’elle ne pouvait qu’absorber comme une éponge et comprendre. Mais au lieu de se laisser déstabiliser, de se laisser enfoncer, elle inversa la tendance. Ce misérable débordait d’une assurance certaine, débordante et d’une fierté qu’elle saisit bien rapidement. Et alors elle laissa l’éponge s’imprégner de tout cela et un sourire en coin se dessina sur ses lèvres.
« Pourquoi pas ? T’as peur qu’une fille te descende dès les sélections ? C’est pour ça que tu t’sens obligé de les dégager une à une avant même qu’on commence ? Arrête ton blabla et file moi un balai, tu verras pourquoi t’as besoin de moi dans ton équipe… » Il fit un pas en avant et elle ne recula pas. Du haut de ses treize ans, Aileen commençait à se démarquer par sa détermination sans faille.
Elle ne déroba pas son regard alors qu’il la toisait de son œil mauvais. Puis, il lâcha un léger sifflement entre ses dents avant de faire un geste de tête.
« Décollez, bande de fillettes. » Aileen ne se le fit pas dire deux fois, elle empoigna son balai – qu’elle avait réussi à glisser dans ses affaires – et l’enfourcha avant de décoller, d’une bonne impulsion donnée sur le sol. L’air siffla à ses oreilles, faisant virevolter ses mèches de cheveux bruns. Bientôt, le capitaine désigna deux équipes, créent avec quelques joueurs de l’équipe actuelle. Aileen observa les autres prendre place autour d’elle et eut un sourire pour Regulus Black. Ils allaient voir, tous, de quel bois elle pouvait se chauffer. Entre elle et ce poste de poursuiveur, il n’y avait que ces essais. Elle ne pouvait pas échouer. Le souaffle fut lancé et elle s’élança. En une demi heure de temps, elle avait marqué 5 buts, en avait échoué 2 et avait réussi à esquiver bon nombre de cognards lancés volontairement dans sa direction. Elle n’était pas bonne, elle était excellente, elle le savait. Le capitaine ne tarda pas à signaler qu’il allait contacter ceux qui étaient sélectionnés. Tous quittèrent le terrain. Au moment où il tourna les talons, il l’interpella.
« Eh, Rosier… La prochaine fois, t’auras le droit de botter les fesses des Poufsouffle, ça te va ? » Il avait lancé un regard sur sa gauche et Aileen ne tarda pas à suivre cette direction. Leur professeur de Vol était là, observant la scène avec ce sourire satisfait qu’il pouvait avoir lorsqu’il avait réalisé quelque chose qui lui plaisait particulièrement. La brunette lui rendit son sourire avant de replonger son regard dans celui qui était désormais son Capitaine.
« Alors arrange-toi pour qu’ils recrutent des mecs. C’est plus cool de botter les fesses à des machos qu’à d’autres filles qui méritent leur place là où on ne les attendait pas forcément. »avril 1976
Expecto Patronum.
« La joie, le bonheur, ces sentiments et émotions qui vous réconfortent. Allez-y, lâchez tout ! Pensez à cela et libérérez-vous ! Telle est la clé pour faire apparaître un Patronus digne de ce nom. Essayez encore une fois ! » Les formulations reprirent dans l’ensemble de la classe, chacun s’évertuant à essayer de faire apparaître cette forme vaporeuse et argenté que leur professeur avait réalisé auparavant. Mais comme il était dur de se concentrer sur des pensées heureuses quand votre seule volonté est de parvenir à faire apparaître cet animal qui vous représente et qui vous défendra devant de nombreux détraqueurs. Quelques rides soucieuses sur le front, Aileen poussa un long soupir, regardant autour d’elle. Une nouvelle élève de Serdaigle venait de réussir son sort et observait son zèbre galoper dans la classe. De l’autre côté de la salle, quelques Serpentards avaient abandonné leurs essais, les voyants peu concluants. Mais c’était mal connaître l’envie de réussir d’Aileen, de se montrer supérieur aux autres et bien meilleure qu’eux. Et puis, le Patronus pourrait bien l’aider dans sa vie si les choses devaient mal tourner pour elle, non ?
Contrairement aux autres élèves, elle n’avait pas que ses propres émotions à maîtriser. Celles de ses camarades venaient parfois la déstabiliser, comprenant leur désarroi, leur envie de tout laisser tomber. C’était dur. Mais il y avait aussi la joie des autres, pour une raison ou une autre. Elle les ressentait toutes, ces différentes petites joies qui venaient renforcer la sienne. Alors elle songea à son entrée dans l’équipe de Quidditch, à son entrée à Poudlard, à son frère qui l’aimait fortement, à ses ambitions futures.
« Spero Patronum. » Sa voix s’était faite douce, un murmure tendre qui vint agiter l’air. Et alors, du bout de sa baguette jaillit quelques filets argentés. Un sourire satisfait se dessina sur les lèvres de la brunette qui observa, comme de nombreux camarades, l’apparition de ce renard sur le sol de la pièce. Il l’observa rapidement avant de faire quelques pas puis de disparaître. Aileen reprit doucement son souffle tandis que deux nombreux regards convergèrent vers elle. Elle était grandement satisfaite d’elle-même mais son sourire s’effaça devant les mines surprises de ses camarades serpents. Ne venait-elle pas de se trahir en partie ? Elle se mordit doucement la lèvre inférieure alors que leur professeur s’approchait d’elle.
« Eh bien, miss Rosier… Voilà une surprise qui vous permet de gagner quelques points pour Serpentard. » Elle eut un petit sourire gêné. Le soir même, dans la salle commune de sa maison, alors que beaucoup revenaient sur le sujet, elle haussa simplement les épaules en soulignant la chance qu’elle avait eut et quand on lui demanda à quoi elle avait pensé, elle avait souri avec malice et répondu qu’elle avait vu la fin des Sang-de-Bourbe. Un petit mensonge qui ne pourrait que l’aider à rattraper cette réussite qui n’en était peut être pas une…
27 août 1977
Growing strong.
« Vous vouliez me voir, mon oncle ? » « Assieds-toi, mon enfant. » Elbert tendit la main vers le divan du large salon du manoir Rosier dans lequel Aileen prit sagement place. Elle portait une robe d’un vert profond dont il lui avait fait présent le matin même, sachant une soirée organisée le soir, soirée où tous les mages noirs et leurs aspirants d’enfants seraient présents. Roy, Kenna et Rhona y était déjà, seuls demeuraient Aileen et son oncle dans la demeure. Il avait assuré qu’il l’emmènerait lui-même et, à l’heure du départ, il l’avait finalement conviée à le rejoindre dans le grand salon où elle était désormais assise. Les cheveux de la jeune fille étaient remontés dans un chignon simple mais élégant, dégageant cette nuque fine et relevée qu’elle avait. Son regard noisette se posa sur son parent et elle lui sourit doucement, essayant de comprendre les raisons de sa présence. Le doute émanait de l’homme. Celui de garder des secrets ou de les révéler, ce qui ne pouvait que rendre un peu plus nerveuse la jeune fille qui possédait ses propres secrets.
« Te voilà bientôt majeure, Aileen… Une chose plus qu’importante dans un monde comme le nôtre. » Aileen choisit d’élargir un peu son sourire avant de répondre dans le plus grand des calmes.
« Ainsi, je ne serais plus un fardeau pour vous, ni pour mère… » « Jamais tu n’en fus un. » Elbert se leva de son fauteuil, soudainement révolté et Aileen eut un léger mouvement de recul, s’adossant correctement au fond du sofa.
« Ta mère n’a pas toujours été juste envers toi… Mais comment pourrait-on lui en vouloir… Tu ressemble tant à ton défunt père, ma chère Aileen. La même droiture dans les gestes, la même tenue supérieur et cette éloquence que tu as… Il était de ceux qui avait pour but de devenir grand en son temps et n’a eu que peu de temps pour le prouver. »Nostalgie. Aileen le devint à son tour, n’ayant que de très rares souvenirs d’un père mort dans des circonstances troubles. Elbert vint s’asseoir à ses côté et releva gracieusement la manche de son bras gauche.
« Je te sais assez réfléchie pour comprendre tout ce qui se passe autour de toi, Aileen. Mais il faut que tu voies les choses pour mieux les comprendre. Aujourd’hui doit être un grand jour pour toi… Celui où tu suivras certainement les traces de ton père… Mais pas uniquement. » Il retourna alors son bras, dévoilant une marque qui ne put que faire frissonner la jeune élève de Poudlard. Elle prit une profonde inspiration avant de relever les yeux vers son oncle qui poursuivait toujours.
« Ton père, ta tante, ta mère… Puis ton frère et ta cousine. Nous lui avons prêté serment. Le Seigneur des Ténèbres annonce une grande ère, Aileen. Nous devons nous tenir prêt. Nous devons nous asservir à ses côtés et lui obéir car lui seul est notre maître dans cette lutte contre cette impureté de Sang qui menace les sorciers. Tu es une Rosier, mon enfant. Beaucoup en ce monde savent ce que cela signifie, peut-être ne le vois-tu pas encore. Bientôt, il ne s’agira plus de petites farces à l’école. Bientôt, tu seras prête à rencontrer le Lord et à lui prouver ta valeur pour rejoindre ses rangs, comme ton frère et ta cousine. Et alors, rien ne pourra plus t’atteindre et mon rôle de voir la jeune fille de mon défunt frère se hisser très haut sera achevé. » Il rabaissa alors sa manche, masquant de nouveau ce tatouage plus que spécial. Aileen déglutit avec difficulté.
« Qu’attendez-vous de moi, mon oncle ? » La respiration de la jeune fille demeurait courte et rapide, comme si elle venait de courir durant longtemps. Elbert prit alors son visage entre ses mains.
« Que tu nous surpasses tous pour trouver place qui est tienne en ce monde. Tu possèdes toutes les armes pour réussir à te hisser au sommet. Alors, prends ce pouvoir et laisse le parler. » Puis, il déposa un tendre baiser sur son front, scellant là cette conversation.