Crédit : avatar : anarchy / aesthetic : oim / signa : endlesslove Points : 7 Hiboux : 222 Club : Membre à part entière du Club des Briseuses de Noix en Chef ; membre honoraire du Gryffy Squad
Métier : Redresseuse de torts serpentardesques Age : 24 Particularité : Kleptomane
Sujet: Un miroir fendu ne se répare jamais | Zéphyr Ven 16 Sep - 1:25
Evitons en amitié d’offenser ou de nous offenser
Rendez-vous aux Trois Balais ce soir. Je suis pressée de te voir, je suis sûre que t’as plein de choses à me raconter ! Les mots débordants d'entrain qu'elle avait écrit il y a quelques jours à peine dansaient encore dans sa mémoire alors qu’Eve Millerfield poussait la porte de la célèbre taverne des Trois Balais. Habituée à la fréquenter lors des samedis après-midis avec toute la troupe de Gryffondors pour boire des litres de Bièraubeurre dans une ambiance agréablement régressive, l’anglaise n’avait pu se rendre jusqu’ici que parce qu’elle avait avant tout obtenu le sésame qui lui permettait de s’esquiver du château. Merlin merci elle pouvait toujours compter sur ses chers Maraudeurs pour lui donner un coup de pouce. Ils savaient d’ailleurs qu’elle leur renverrait l’ascenseur dès qu’ils en auraient besoin puisque c’était grâce à eux qu’elle allait pouvoir se changer les idées.
Le parchemin résumant les instructions données par les Maraudeurs griffonnées à la hâte dans sa main droite, la blonde glissa soigneusement ce dernier dans la poche intérieure de son jean, peu désireuse de l’égarer par accident. Même si l’atmosphère de l’échoppe semblait détendue et qu’elle n’y courait très certainement aucun risque, Eve avait compris depuis le temps qu’elle connaissait les quatre garçons dans le vent de Gryffondor que ce parchemin était un bien si précieux qu’elle ne devait absolument pas perdre et qui lui assurait un retour saine et sauve à Poudlard. Mieux valait qu’elle s’en tienne aux consignes qu’ils lui avaient donnée.
Un coup d’œil dans les alentours lui indiqua très rapidement que son ancien camarade de classe n’était pas encore là. Peut-être qu’il aurait du retard, elle n’aurait qu’à l’attendre. Après tout, c’était ça, être adulte. Parfois se faire rattraper par le temps et par les ennuis, et d’autres fois tout simplement ne pas être aussi ponctuel qu’autrefois, ne pas être aussi impatient. Eve avait du mal à croire que Zéphyr puisse un jour s’assagir pour de bon et devenir un adulte responsabilisé ; il n’était pas le modèle qu’elle s’était décidée de suivre sans raisons.
L’un des employés de l’auberge s’approcha d’elle, son regard inquisiteur signifiant qu’il attendait qu’elle consomme quelque chose – ou qu’elle prenne la porte, au choix. A cette heure-ci, qu’est-ce qu’elle pouvait bien demander ? Trop tard pour un café, trop inapproprié pour un verre de vodka-citrouille, et Eve n’avait franchement pas envie de siroter une Bièraubeurre. La blonde mit fin à son hésitation interne en même temps qu’elle prit la parole pour passer commande. « Un … jus de citrouille, s’il vous plaît ? » Sa requête arracha un sourire un brin amusé au serveur, qui se détourna d’elle pour lui préparer sa boisson. Etre majeure ne signifiait pas « vouloir constamment se saoûler au Whisky-Pur-Feu pour jouer les dures à cuire ». Quoique … Se souciant bien peu des états d’âme du personnel quant à ses goûts en matière de rafraîchissements, Eve se prit d’intérêt pour le reflet lumineux qui se réverbérait sur le comptoir, ses ongles un peu rongés tapotant nerveusement sur le rebord de bois. Elle n’était pas plus anxieuse que d’habitude, simplement contente et pressée, parcourue par cette petite tension positive qui vous envahit juste quelques secondes, quelques minutes avant que vous ne retrouviez l’ami perdu dans la foule et que vous profitiez, insouciants.
Le tintement des glaçons dans un verre qui s’entrechoque à quelques centimètres de sa main la fit relever le menton, marmonnant un bref remerciement alors qu’elle empoignait le verre pour boire une gorgée. Elle avait la langue sèche, un peu comme si celle-ci s’était déjà préparée à parler beaucoup, beaucoup trop en si peu de temps. Pourtant elle n’était même pas au début de ses peines. Les yeux de la Gryffondor s’écartèrent des tréfonds orangés de sa boisson pour chercher le point de repère qui manquait encore à sa présence dans ce lieu. La rouge et or n’était pas là uniquement pour sa soif mais pour revoir son ami de longue date, et à l’heure actuelle, il était encore absent à ses côtés. Absent, mais pas pour bien longtemps. La ligne haute et mince d’un homme engoncé dans une veste de cuir au bar retint son attention.
Elle s’en approcha, plus doucement que ce qu’elle avait prévu, elle qui avait pensé naïvement pouvoir lui sauter au cou avec la spontanéité enfantine qui lui seyait. Quelque chose d’invisible freina cet enthousiasme. « Zéphyr ? » Si elle ne savait pas que c’était bel et bien lui, sa question n’aurait rien eu des notes rhétoriques qu’elle inspirait. Eve n’allait pas jusqu’à songer que son ami et mentor s’était complètement transfiguré physiquement ; il était toujours le même, simplement un peu plus âgé, un peu plus mûr – ça, elle le savait, elle l’avait vu assez récemment pour ne pas ignorer ce détail. Mais c’était le visage qu’il arborait, la lueur particulière habituellement si vive qui éclairait son regard, chaque expression de son faciès ; elle était absente ce jour-là. Elle n’habitait pas les iris frangés de longs cils de l’ex-rouge et or. Accoté là au comptoir du large bar des Trois Balais, la vision du jeune Aït-Malek ravivait en elle des souvenirs contrastants. Lui qui avait bien souvent eu la réputation d’être un Lion, un vrai, de ceux à l’euphorie et à l’enthousiasme contagieux, il paraissait avoir été atteint. Touché quelque part d’un mal indicible qu’Eve n’avait encore jamais observé chez lui et qui l’intriguait tant qu’elle en oublia toute politesse.
Métier : officiellement organisateur de soirées pour sangs-purs, offieusement malfrat plus connu sous le pseudonyme de Berlioz
Sujet: Re: Un miroir fendu ne se répare jamais | Zéphyr Jeu 6 Oct - 17:14
Un miroir fendu ne se répare jamais
"La vie accorde à chacun de nous quelques rares moments de bonheur total. Ce sont parfois des jours, parfois des semaines. Parfois même des années. Tout dépend de la chance. Leur souvenir nous accompagne à jamais et se transforme en une contrée de la mémoire où nous tentons de retourner le reste de notre existence sans jamais y parvenir. "
Evyr
Zéphyr descendit de sa chambre en traînant des pieds, épuisés alors qu’il avait déjà dormi toute la journée. En ce moment, il payait sa chambre aux Trois Balais en argent comptant, plutôt que de s’arranger avec Rosemerta en lui rendant quelques services pour régler sa chambre comme il le faisait d’habitude. Il n’avait pas l’énergie de nettoyer des chambres puant le troll de Montagne. Dans son ombre, une petite boule de poils sautillait en le suivant, se prenant les pattes et trébuchant à chaque détour de couloir tant elle était excitée. Quand il la regardait, Zéphyr ne pouvait s’empêcher de laisser apparaître sur ses lèvres un sourire attendrit. Duchesse était sa très jeune chienne, relique d’un passé qu’il ne parvenait pas à laisser en arrière. Trouvée dans la rue, elle semblait être à la croisée entre plusieurs races, ce qui faisait évidemment – aux yeux de Zéphyr tout du moins – tout son charme. Ses pattes avant, sa truffe et ses grandes oreilles étaient d’un noir de jais, comme si elle était tombée la tête la première dans un tas de charbon. Le reste de son corps était beige, et surtout, particulièrement, son pelage faisait certainement d’elle la plus douce de toutes les petites chiennes. Elle lui semblait minuscule mais avait pourtant grandit à une allure folle ; elle avait déjà pris vingt bons centimètres au garrot depuis qu’on la lui avait offerte. Elle avait été un de ses cadeaux pour son vingt-et-unième anniversaire, et de loin son préféré. Trouvée dans la rue, laissée pour morte et tenant dans la paume d’une main, Zéphyr s’était occupé d’elle comme de la prunelle de ses yeux alors qu’elle n’était même pas encore véritablement sevrée. Maintenant, il semblait au jeune homme que c’était elle qui s’occupait de lui, alors qu’il avait à son tour été laissé en arrière. Elle le faisait sourire.
La soulevant de terre pour la faire descendre les escaliers – elle avait encore tendance à trop s’y casser la figure à force de les dévaler – il lui chuchota quelques mots, lui expliquant ce qu’ils allaient faire de leur soirée. Comme elle s’en doutait, après une petite promenade dans Pré-Au-Lard, ils retourneraient aux Trois Balais, au bar cette fois, dans lequel elle serait comme toujours libre de gambader pendant qu’il resterait assis au bar à boire un verre – ou deux. Ah oui ! et elle rencontrerait Eve, qu’elle n’avait pas encore eu l’occasion de croiser, et qui avait forcé son cher maître à la retrouver le soir-même, sans qu’il puisse trouver un moyen de refuser. Il la laissa glisser hors de ses bras alors qu’il posait ses pieds sur le sol du bar, avant que quiconque ne puisse l’entendre discuter avec son chien et le prenne pour un fou. Alors bien sûr, dans le monde sorcier, un chien qui parle n’était peut-être pas aussi rare que dans le monde moldu, mais tous les habitués des Trois Balais commençaient maintenant à connaître Duchesse et avaient bien compris que son seul outil de langage étaient ses aboiements joyeux. Elle passait ses soirées à gambader entre les tables à réclamer de la nourriture et de l’attention à droite et à gauche, jusqu’à ce qu’un frustré ne la menace par peur ou stupidité et que son cher maître – dans ces instants-là plus papa qu’autre chose – ne vienne la sortir de là en menaçant à son tour le sorcier qui avait osé critiquer son petit trésor.
Duchesse et lui firent donc un petit tour de Pré-Au-Lard, la jeune chienne traînant derrière Zéphyr, son attention attirée par mille et un détails comme si elle découvrait quelque chose de nouveau à chaque seconde. Tout semblait l’émerveiller, ce qui attendrissait Zéphyr au plus haut point. Evidemment, ce dernier ne connaissait ni le principe de la laisse ni même celui du collier. A deux mois à peine, Eve était déjà bien dressée ; en tout cas, elle répondait au moindre appel de son maître, que ce soit par son prénom ou par un sifflement précis. Bientôt, ils étaient rentrés à l’Auberge et Zéphyr s’asseyait sur son habituel fauteuil alors que Rosemerta, un air inquiet traversant son regard, lui servait sa boisson habituelle : un whisky-pur-feu. Ses journées étaient de plus en plus routinières : le matin, un petit job pour x ou y, souvent très facile et pas vraiment rentable, juste suffisamment pour payer sa chambre, quoi. Il déjeunait rapidement avant de rentrer aux Trois Balais pour s’effondrer sur son lit et faire une sieste avec sa chienne, et le soir, il descendait passer toute la soirée au bar, à admirer le fond de son verre. Avec un sourire, il indiqua ce soir-là à Rosemerta :
« Tu vas être contente, ce soir j’ai de la compagnie. Tu arrêteras de me tanner, après ? »
Rosemerta s’inquiétait véritablement pour lui. Elle avait fini par apprendre à le connaître, à force de le laisser traîner dans son auberge, et si elle n’aurait su expliquer pourquoi, elle savait que Zéphyr n’allait pas bien. Un sourire satisfait aux lèvres, elle félicita le jeune homme qui ne l’écoutait déjà plus. La veste de son père sur son dos, un frisson lui parcourait l’échine alors qu’il repensait à ce qu’il aurait pu être en train de faire, si elle n’était pas partie, quelques semaines plus tôt, définitivement rentrée dans son pays natal. Il n’eut pas le temps de s’inventer trop de scénarios car il sentit une présence s’installer à côté de lui. Eve était arrivée, et elle s’adressait à lui d’une voix douce qu’il sentait déjà inquiète. C’était affiché sur son visage, qu’il venait de perdre la nana de sa vie, ou quoi ?
Duchesse, jalouse de voir l’attention de son maître dérobée par une blonde, rappliqua immédiatement de l’autre côté du bar, pour venir se hisser sur le tabouret de Zéphyr, précisément entre Eve et lui. Souriant sans véritable joie, Zéphyr caressa son chien d’une main avant de planter son regard assombri dans celui, bien plus brillant, de la Gryffondor. La voix fatiguée, il fit :
« Salut, Eve. Je te présente Duchesse. Vous allez bien vous entendre, je suis sûr. – puis, il tendit le bras pour venir le poser sur l’épaule d’Eve – allez, serre moi dans tes bras je sens que tu en meures d’envie. »
Il dit cela sans véritable entrain, alors qu’il attirait Eve vers lui de cette main qu’il avait posé sur son épaule. Bientôt, il la serrait dans ses bras, peut-être un peu trop fort, peut-être pour lui faire ressentir la douleur qui ne le quittait pas depuis qu’elle était partie.
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Sujet: Re: Un miroir fendu ne se répare jamais | Zéphyr Jeu 3 Nov - 1:07
Evitons en amitié d’offenser ou de nous offenser
Bloqué entre deux expressions, ou tout simplement perdu dans ses pensées. C’était un art bien compliqué que celui de décrypter l’état dans lequel se trouvait un être cher à son cœur, et Eve s’y sentait plutôt comme une amatrice qu’une professionnelle. Parfois, il était juste simple comme bonjour de remarquer quand elle avait offensé Lily – un pincement de lèvres, un soupir un peu agacé – ou quand Marlene était triste – ce genre d’états d’âme de la jeune demoiselle était si rarissime qu’Eve l’aurait de suite détecté.
Mais Zéphyr avait ce don pour faire comme si tout allait bien, ou plutôt pour donner l’impression que les choses étaient naturellement faciles pour lui. Il avait l’aisance et la confiance, il ne pouvait rien lui arriver de proprement insurmontable, n’est-ce pas ?
Avant même que la sang-mêlée n’ait l’occasion de réagir, deux pattes animales vinrent l’interrompre et la dénommée Duchesse de japper pour aller à sa rencontre. L’animal attira forcément les regards et notamment celui de la septième année qui esquissa un bref sourire amusé. « Oh t’as un chien maintenant ? » Eve s’accroupit pour adresser quelques caresses affectueuses au canidé dont l’enthousiasme semble frénétique. Le chien paraissait plutôt jeune, ce qui se percevait dans son comportement encore un peu fou ; pour autant il allait étrangement de pair avec son nouveau maître qui n’était sûrement pas celui de départ – mais qu’importe, tant que Duchesse était satisfaite de Zéphyr et des bons soins qu’il devait indubitablement lui prodiguer.
La blonde eut tout juste le temps de se relever pour saluer enfin son ami que celui-là l’enserra sans prévenir, faisant mine d’avoir interprété de sa part l’envie de le prendre dans ses bras – le genre de contacts qu’Eve se permettait sans mal avec son entourage le plus proche, certes. Mais la façon que l’ex-rouge et or eut de la garder contre lui un peu trop longtemps, ces quelques secondes de flottement où la jeune fille eut davantage la sensation d’être noyée sous une bouffée de soulagement mêlée de détresse la rendirent un peu perplexe. Elle lui rendit néanmoins son étreinte, parce que c’était ainsi qu’on agissait entre amis véritables. On se serrait les coudes, on était là l’un pour l’autre. Elle ne put s’empêcher de dédramatiser par un trait maladroit d’humour qu’elle aurait tout le temps de se reprocher plus tard, quand elle repenserait à cette soirée. « Zéphyr Aït-Malek qui me réclame des câlins, t’es sûr que ça va ? » La question semblait quasiment rhétorique mais Eve ne savait jamais comment appréhender ses amis lorsqu’ils traversaient une mauvaise passe. Et là, à voir l’anglais tel qu’il se tenait devant elle, la blonde n’avait aucune idée de ce qui était la cause de son air vaguement soucieux.
La Gryffondor s’assit à côté de lui, toujours au bar, son verre face à elle servant à occuper ses deux mains qui jouaient nerveusement à agiter les glaçons flottant dans le jus de citrouille. « Excuse, mais tu tires une tête d’enterrement. Pourtant je suis pas en retard cette fois ! » poursuivit une Eve décidée à faire comme si tout allait bien. Ou plutôt comme si chaque problème avait sa solution et que celui qu’affrontait Zéphyr en ce moment, aussi insoluble pouvait-il avoir l’air, avait nécessairement une réponse qu’ils allaient très vite trouver pour chasser cette drôle d’atmosphère entre eux.
Peut-être pouvait-elle tenter une approche directe. Savoir pourquoi l’aiderait à deviner comment, d’une certaine façon. La rouge et or but une longue gorgée de sa boisson avant de reposer le verre un peu brusquement et de demander, de but en blanc, avec toute la délicatesse qu’on lui connaissait. « T’as eu une journée de merde ? »
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Sujet: Re: Un miroir fendu ne se répare jamais | Zéphyr Dim 18 Déc - 18:38
Un miroir fendu ne se répare jamais
"La vie accorde à chacun de nous quelques rares moments de bonheur total. Ce sont parfois des jours, parfois des semaines. Parfois même des années. Tout dépend de la chance. Leur souvenir nous accompagne à jamais et se transforme en une contrée de la mémoire où nous tentons de retourner le reste de notre existence sans jamais y parvenir. "
Evyr
Zéphyr était loin d’être un solitaire, si bien que même dans des moments de détresse comme celui qu’il vivait à ce moment-là de sa vie, il avait envie d’être entouré. Alors évidemment, il faisait semblant de n’avoir besoin de personne, il agissait comme si la générosité de Rosemerta ne le touchait pas, comme si les nombreuses lettres de sa mère lui passaient au-dessus de la tête, comme s’il pouvait encore s’endormir sans sentir sa petite boule de poil contre lui. Il faisait comme si l’étreinte d’Eve n’était rien de plus qu’un bonjour habituel, alors qu’en fait, elle était essentielle à ses yeux. En véritable Lion, il avait besoin de sa horde, dont Eve était un élément essentiel, particulièrement en ce moment. Le Choixpeau ne s’était pas trompé en le répartissant chez les Rouges et Or. Zéphyr était persuadé que seul, on n’atteignait pas ses buts, et il savait que dans ce cas précis, il ne s’en sortirait pas sans les autres. Ce n’était néanmoins pas aussi facile qu’il l’aurait souhaité, et alors qu’il sentait le regard de la jeune fille le sondait, il se demandait comment il allait aborder le sujet. Pouvait-il tout lui dire ? Elle n’était au courant de rien, même pas de l’existence de Sasha ou d’une moindre fille qui aurait fait chavirer sa vie et son cœur. Les seuls qui savaient étaient sa mère, ses sœurs, Jangor, et Elijah. Il faudrait tout recommencer depuis le début, il faudrait ressasser les détails pour qu’Eve puisse bien saisir ce à quoi elle avait affaire, mais en même temps, Zéphyr était certain qu’il n’aurait pas besoin d’en dire trop pour qu’elle comprenne la détresse qui le saisissait. Il avait essayé de s’en sortir seul, sans rien ne dire à personne. Ça ne fonctionnait pas, et il fallait se rendre à l’évidence : il devrait se plier à l’exercice difficile de tout raconter pour qu’enfin on puisse l’aider.
Evidemment, Eve avait saisi que quelque chose clochait et, à sa manière, elle essayait de demander au garçon qu’est-ce qu’il lui arrivait. Un sourire triste habita un instant le visage de Zéphyr, qui appréciait sincèrement l’effort. Elle se fit servir un verre de Jus de Citrouille qu’elle sirota un instant avait de lui demander, un peu brusquement, s’il avait passé une mauvaise journée. Zéphyr plongea un moment son regard dans le sien, cherchant une réponse, avant d’attraper son verre et de dire, descendant de son tabouret :
« Plutôt un mauvais mois. » Lâchant enfin son regard, il jeta un œil sur la pièce, avant d’ajouter : « Vient, on va se trouver une place au calme. »
Dans un des coins de la grande Auberge des trois balais, deux banquettes autour d’une table venaient de se libérer. Zéphyr s’y dirigea, sans attendre l’approbation d’Eve, Duchesse dans son ombre. Il s’assit sur une banquette, se laissant glisser jusqu’au bout de celle-ci, si bien qu’il put s’accoler au mur et laisser sa chienne monter à côté de lui. Assise toute contre lui, elle avait les pattes avant sur sa cuisse et regardait, l’air curieuse, la table, s’assurant sûrement qu’il n’y avait rien à manger. Zéphyr n’avait plus d’appétit, ce n’était pas auprès de lui qu’elle allait trouver quelques gourmandises en plus de ses repas habituels. Si elle était maline, elle changerait de banquette et attendrait qu’Eve commande quelque chose. Ou alors, elle s’échapperait de la surveillance de son maître pour aller quémander auprès des autres clients qui, eux, avaient une assiette fumante sous les yeux. Les pensées de Zéphyr se laissaient aller à ces élaborations alors qu’Eve s’asseyait en face de lui ; c’était certainement plus facile de penser à ce que sa chienne grignoterait qu’au sujet qu’il s’apprêtait à aborder. Il finit tout de même par retrouver le regard de la Gryffondor et, buvant une gorgée de son Whisky-Pur-Feu, il se décida. Il avait accepté ce rendez-vous, et avait décidé que ça ne serait pas pour parler de Quidditch ou d’autres fioritures.
« C’est bien que tu sois là, Eve … Je ne suis pas au sommet de ma forme et … – un euphémisme – je n’en ai encore parlé à personne mais Rosemerta s’inquiète – la belle excuse – et je crois que tu seras la plus à même à comprendre parce que … parce que tu n’as jamais entendu parler de cette histoire et que, je crois … je crois que tu pourras me donner un avis objectif. »
Pauvre Eve, il lui donnait un rôle auquel elle ne s’était sûrement pas préparée à devoir prendre quand elle s’était dirigée à ce rendez-vous pour le retrouver. Mais il n’allait pas déjà commencer à s’excuser, sinon il ne s’en sortirait pas. Sortant de la poche de son blouson une petite boîte en métal joliment peinte – ayant appartenu à son père bien sûr, Zéphyr en sortit du tabac, quelques feuilles à rouler et un filtre. Il aurait pu assembler le tout d’un coup de baguette, mais se concentrer sur la fabrication d’une cigarette à partir de tous ces éléments lui permettrait de ne pas trop s’effondrer.
« En février dernier j’ai rencontré une fille, Eve. Je l’ai rencontrée et je suis tombé amoureux, et maintenant elle est partie et … et je ne tiens plus debout. C’est horrible, Eve, c’est horrible. On était d’accord, on s’est séparés parce que notre relation est impossible, elle est retournée en Russie et on ne se parle plus depuis un mois, et je ne veux pas la contacter. Je sais que c’est mieux comme ça, que ça ne fonctionnera pas, jamais. Mais c’est horrible. »
Sa voix serrée, il replia la feuille autour du tabac et d’un coup de langue, il la scella. Les mains tremblantes, il la porta rapidement à ses lèvres, l’alluma du bout de sa baguette et, avidement, tira sa première bouffée. Portant à nouveau son regard sur Eve, elle pourrait maintenant le voir au bord des larmes. Il n’avait pas trop pleuré, autour de cette affaire. Il s’était contenté de transporter un mal-être incessant, bloqué au fond de lui ; c’était le fait d’en parler qui lui nouait la gorge et qui titillait ses glandes lacrymales, et il n’aimait pas trop cela. Les larmes représentaient l’ultime signe de faiblesse, et il n’aimait pas montrer cette part de lui, à quiconque. Néanmoins, Eve était là pour ça, et peut-être que face à elle, il s’autoriserait à la montrer.